18 janvier 2022. Proposition de Loi visant à démocratiser le sport en France. Intervention dans la discussion générale, en qualité de chef de file de mon groupe.
INTERVENTION SÉANCE
Proposition de Loi visant à Démocratiser le Sport en France
Mardi 18 janvier 2022 (6’)
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Madame la Présidente / Monsieur le Président,
Madame la Ministre,
Monsieur le Président de Commission,
Monsieur le Rapporteur,
Mes Chers-ères Collègues,
Le mouvement sportif, fort de ses 17 millions de licenciés et de ses 15 millions de pratiquants hors structures, de ses 175.000 associations animées par 3,5 millions de bénévoles – oui, le sport, premier mouvement social de France – méritait qu’un texte de loi lui soit exclusivement consacré. Ce texte arrive bien tard, en toute fin de législature et en urgence. Mais le Parlement joue pleinement son rôle et l’a très fortement enrichi. Composé initialement de 11 articles, il est passé à 27 à l’issue de son examen à l’Assemblée Nationale. Au sortir de nos travaux de ces deux jours, nous serons très probablement autour de la soixantaine.
À mes yeux, ce texte aurait dû débuter par l’actualisation de la relation qui unit l’État et le mouvement sportif : c’est à dire la délégation pour missions de service public, toile de fond de cette PPL. Le choix d’intégrer cette actualisation dans un Projet de Loi précédent, sur le respect des principes de la République, relève quasiment de l’anomalie.
Cette proposition de loi vise un objectif bien légitime : la démocratisation du sport, c’est à dire un développement du nombre de pratiquants, par la levée des obstacles qui entravent l’accès aux différentes A.P.S. (Activités Physiques et Sportives). Cette intention est louable, pour des raisons historiques : le fait sportif n’est pas encore véritablement reconnu pour son importance sociétale, mais aussi pour des motifs conjoncturels. Selon l’enquête de l’Institut IPSOS, rendue publique fin décembre dernier, 66% des sondés ont déclaré pratiquer un sport en 2021, contre 81% en 2020.
Par ailleurs, une véritable urgence sanitaire se précise pour les jeunes générations. Selon l’étude de l’ANSES, étude concernant les jeunes de 11 à 17 ans, 49% présenteraient un risque sanitaire très élevé avec, en moyenne par jour : plus de 4h30 devant un écran et moins de 20 minutes d’activité physique. Ce qui constitue, aux yeux de l’Agence, une véritable bombe sanitaire à retardement.
Le texte sorti de l’Assemblée Nationale, comporte des avancées : la prise en compte des établissements sociaux et médico-sociaux, la facilité d’accès aux équipements sportifs scolaires, la précision des missions des conférences régionales du sport, certains aspects de la gouvernance des fédérations et ligues professionnelles, ou bien encore la diversification du statut juridique des sociétés sportives.
Nous aurons un débat sur la respiration démocratique interne aux instances fédérales. Je pense, bien sûr, à leur gouvernance.
Nous exprimerons des positions visant à une plus grande démocratisation et une plus forte territorialisation des pratiques, certes, mais également des organisations et des fonctionnements, dans le respect des débats conduits récemment par le CNOSF, qui fédère l’ensemble des disciplines sportives, olympiques ou non, de notre pays.
Cette PPL doit constituer une étape décisive dans la longue marche vers l’égalité hommes – femmes dans le sport. Sur ce sujet, ne soyons pas plus conservateurs que la société civile et nous, Sénat, ne soyons pas plus conservateurs que l’Assemblée Nationale.
Mettons-nous au diapason des Jeux Olympiques de Paris car, pour la première fois, nous aurons des J.O. paritaires en 2024.
Mettons-nous au diapason du combat mené par Alice MILLIAT, sportive française qui avait su fédérer le mouvement sportif féminin, en France, puis au niveau mondial.
À l’issue de cette PPL, on sera loin d’avoir épuisé des dimensions majeures du phénomène de société que représente le sport.
Exemples :
- Un Pass’ Sport aujourd’hui en application, mais qui devra être étendu et durable.
- La concrétisation véritable du sport sur ordonnance (on va élargir les prescriptions, mais pas les remboursements).
- La reconversion des sportifs de haut niveau,
- La relation sport scolaire / sport fédéral qui ne peut se réduire à la seule ouverture dans la rue voisine des salles de sport se trouvant dans l’enceinte des écoles et établissements d’enseignement.
- Ou bien encore : la promotion du sport féminin et du handisport, la question de l’emploi sportif ou la nécessité d’envisager un programme ambitieux d’équipements sportifs traditionnels.
- Sans oublier une fonctionnalité clarifiée pour les C.T.S. (Conseillers Techniques Sportifs).
Un sujet a défrayé la chronique : la possibilité, pour une ligue sportive professionnelle, de créer une société commerciale chargée d’optimiser ses droits audiovisuels, dès lors que la Fédération concernée lui a transféré la propriété juridique de l’exploitation de ces droits.
Le contexte actuel, mais également les précautions figurant dans le texte (avis conforme ou accord de la Fédération) doivent nous conduire à donner toutes ses chances de réussite à la société commerciale.
Madame la Ministre, j’apprécie l’inscription dans la loi de la plateforme de lutte contre la manipulation des compétitions sportives, objet de la proposition de loi que j’avais déposée. Mais reconnaissons que les progrès relatifs à l’éthique du sport demeurent modestes, alors que (pour ne prendre qu’un seul exemple), selon la D.N.C.G (Direction Nationale du Contrôle de Gestion) des clubs, 60% des agents de footballeurs échappent à toute réglementation.
Il en est de même pour la problématique sport – entreprise : mécénat, sponsoring, développement des activités en milieu professionnel ou facilitées par l’entreprise… ; j’espère que dans le cadre de la R.S.E., ce dernier manque sera comblé par amendement. Alors que, paradoxalement, Paris abrite aujourd’hui le plus grand incubateur du monde dans le domaine du sport.
Avant de conclure, j’exprimerai un regret lié à l’actualité. Il s’agit de l’absence totale du sport dans les débats de la présidence française de l’Union européenne, alors que 2022 sera l’année européenne de la Jeunesse.
Notre Commission a déjà fait évoluer le texte, souvent à partir d’amendements communs ou très voisins, par-delà nos sensibilités politiques, notamment avec le Rapporteur Michel SAVIN.
Nous continuerons à intervenir dans cet état d’esprit.
Si l’on veut un pays plus juste et plus solidaire, il faut en passer par des réformes permettant d’acquérir de nouveaux droits et de nouvelles libertés. Parmi ces droits, figure le droit au sport, plus généralement le droit à l’activité physique et sportive, le droit à l’émancipation par le corps.
Faisons en sorte que ce texte de loi y contribue activement et soit perçu comme une dimension appréciable de l’héritage olympique des J.O. de Paris (2024).
Je vous remercie.