Présentation du rapport d’information parlementaire, devant la presse, au Sénat le 16 décembre 2017
La mission d’information a été lancée au printemps 2016 après une crise sans précédent intervenue en 2015 entre la Fédération française de football (FFF) et la Ligue professionnelle de football (LPF) à propos du nombre de montées et de descentes entre les championnats de première et deuxième division.
Derrière ce différend, c’est en fait l’organisation même du football professionnel qui a été interrogée dans un contexte marqué par un accroissement considérable des prix payés par les chaînes par abonnement pour obtenir les droits de retransmission des principaux championnats en Europe. A la question « qui décide ? » s’ajoutent celles du « comment répartir cette manne ? » et « comment rendre le championnat français plus attractif tant pour les spectateurs que pour les investisseurs ? ».
La loi – d’origine sénatoriale – du 1er mars 2017 visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs a déjà apporté un certain nombre de réponses à cette question de la compétitivité. L’allongement de la durée d’attribution du numéro d’affiliation, la possibilité pour les clubs de conclure un contrat relatif à l’exploitation commerciale de l’image, du nom ou de la voix d’un sportif ou d’un entraîneur professionnel et l’extension de la garantie d’emprunt par les collectivités territoriales aux projets d’infrastructures sportives ont été très largement salués.
Pour autant, alors même que le rapport de la Grande Conférence sur le Sport Professionnel Français d’avril 2016 comportait nombre de propositions relatives aux évolutions institutionnelles nécessaires à la gouvernance du sport professionnel, ce sujet n’a pas fait l’objet de dispositions dans la loi du 1er mars 2017 précitée. En choisissant de concentrer son attention sur le football professionnel, la discipline la plus avancée sur la voie du « sport spectacle », la mission d’information a considéré que d’autres disciplines pourraient être prochainement concernées par les évolutions préconisées pour la gouvernance du football, à l’image du rugby et du basket, par exemple.
À noter, enfin, que la plupart des 17 propositions formulées pour « muscler le jeu » du football professionnel ouvrent de nouvelles possibilités aux instances, sans pour autant se substituer à l’autonomie de la fédération. Elles forment, néanmoins, un « tout » cohérent qui n’oublie pas la nécessité de réaffirmer la responsabilité de l’État dans le développement du sport.
17 PROPOSITIONS POUR « MUSCLER LE JEU » DU FOOTBALL PROFESSIONNEL
- Remplacer la convention pluriannuelle signée entre l’État et la FFF qui décline aujourd’hui un programme d’actions en faveur des priorités ministérielles par un véritable contrat d’objectifs et de moyens (COM)ayant pour périmètre l’ensemble des actions et des moyens de la fédération ;
- Engager dès 2017/2018, avec leur accord, l’entrée de la FFF, de la FFR d’une part et de la LFP et de la LNR d’autre part, aux côtés d’un opérateur au capital du Stade de France en lieu et place de l’État ;
- Renforcer la légitimité démocratique de la FFF en prévoyant une désignation directe des membres de l’Assemblée générale par les 17 328 clubs tout en conservant la possibilité d’une représentation spécifique pour les clubs professionnels (les statuts de la FFF prévoient à l’heure actuelle une représentation des clubs professionnels à hauteur de 37 % des voix) ;
- Faire évoluer le mode de scrutin utilisé pour désigner l’équipe dirigeante (scrutin de liste avec l’ensemble des responsabilités attribuées à la liste arrivée en tête) afin de permettre une représentation plurielle au sein des organes de direction de la FFF ;
- Limiter à 3 le nombre des mandats successifs du président de la FFF et de la LFP ;
- Poursuivre l’effort de structuration des supporteurs au niveau des clubs et au niveau national en favorisant l’émergence d’une fédération des supporteurs qui aurait vocation à intégrer les instances de gouvernance de la FFF et de la LFP ;
- Ouvrir la possibilité pour la FFF de créer plusieurs ligues professionnelles en lieu et place de la LFP afin de mieux prendre en compte les spécificités de chaque championnat tout en conservant une solidarité forte entre les ligues à travers une convention pluriannuelle ;
- Clarifier le pouvoir d’évocation dont bénéficie la FFF au regard des décisions de la LFP et mieux identifier le « bloc de compétences » de la Ligue ;
- Allonger la durée de la convention qui lie la FFF et la LFP de 5 ans au maximum aujourd’hui à 5 à 8 ans, afin de sécuriser la Ligue dans son existence et prévoir dans le code du sport qu’une fois créée une ligue ne peut être remise en cause qu’en cas de retrait de la délégation à sa fédération ;
- Prévoir une obligation pour les clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 de posséder un centre de formation et de développer la formation des joueuses ;
- Amener l’ensemble des clubs de Ligue 1 à créer une section féminine ;
- Allonger la durée du premier contrat professionnel de 3 ans au maximum à 3 à 5 ans au maximum afin de permettre aux clubs de mieux valoriser leur investissement dans la formation ;
- Mieux réguler l’évolution des effectifs des clubs – déstabilisée par l’arrêt Bosman de 1995 – en instituant un quota de joueurs formés localement pour l’ensemble des compétitions organisées par la LFP sur le modèle des règles définies par l’UEFA en Champions League ;
- Instituer un plafonnement de la masse salariale (« salary cap ») en Ligue 2 calculé en fonction du chiffre d’affaires de chaque club pour préserver la pérennité de chacun d’entre eux ;
Examiner la possibilité de faire évoluer le championnat de National en véritable Ligue 3 professionnelle gérée en lien étroit avec la Ligue 2, au sein, le cas échéant, d’une seconde ligue professionnelle ;
- Permettre à la LFP, si elle le souhaite, de créer une filiale sous forme de société commerciale pour négocier les droits audiovisuels et les autres recettes commerciales, la ligue restant compétente pour répartir le produit des ventes et exercer ses compétences régaliennes ;
- Intégrer la formation parmi les critères définis par le code du sport pour répartir les recettes des droits TV.